La Nuit

Texte tiré d’un atelier d’écriture
Contraintes : couleur violette
émotion : haine / odeur : baies sauvages / lieu : lande écossaise en fleur / objet : pochette à secrets

 

Contre la nuit je cours.
Contre elle car je la hais.
Elle me prend pour une gamine, me ridiculise, entre ses bras je panique, et puis la garce me jette au sol.
Les animaux du bois hululent, me toisent de là-haut, se moquent de moi. Je me suis écorchée contre un buisson de baies sauvages, leur odeur sucrée m’écœure. Je les hais elles aussi, elles me dégoûtent.
Je me relève, je n’y vois rien. C’était une stupide racine.
Je crie :

– Eh la nuit, pour qui tu te prends ? Tu crois tout savoir parce que c’est à toi que les gens confient leurs secrets ? C’est à cause de toi s’ils cachent, s’ils mentent, si leurs actes ne laissent pas de trace et que nos cris sont l’écho du silence. Tu m’entends, la nuit ? Je te hais !

Je reprends ma course.
Moi je ne lui dirais rien. Mes secrets elle ne les aura pas, je les garde près de mon cœur dans ma pochette violette. Ma pochette.
Ils ont tous voulu me la prendre et je les avais prévenu que moi, dans cette vie, ça n’arriverait pas. Puis quand leur sang a surgi des entailles ils ont joué les étonnés, mais c’était bien fait. Mérité, mérité.

– Tu vois, la nuit ? Je suis dangereuse, moi, dingue, moi. Prends garde à toi, n’approche pas.

Le bois s’arrête brusquement et je déboule dans la lande comme une dératée.
La nuit a compris. Prudente, elle recule. J’y vois un peu mieux. La Lune est presque pleine. Une aura violette irrigue la plaine.
L’herbe sèche crisse sous mes pas, j’ai arrêté de courir.
Elle est encore là mais je sais que j’ai gagné. À petits pas la nuit s’en va, et moi je reste, ma pochette contre moi.


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